Niall Brown, violoncelle & Isabelle Trüb, piano, au service de Beethoven

Compte-rendu:

Niall Brown, violoncelle, et Isabelle Trüb, piano, forment couple dans la vie civile comme dans la vie musicale… Ils pratiquent donc ensemble le répertoire pour violoncelle et piano depuis quelques décennies, ce confère à leur duo une connivence d’intentions particulièrement réussie.

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Prêts au départ ?

Ces deux excellents musiciens ont en outre des attaches dans la région, notamment à l’occasion de la « Semaine internationale de piano » en août, au temple de St-Légier, et ils sont les créateurs et animateurs du « festival AMO » à Ollon.

À cela s’ajoutait, à l’occasion de ce « Concert à La Goulue » le fait que Niall Brown étrennait un nouveau violoncelle récemment réceptionné suite à une commande auprès d’un luthier de Bruxelles. La sonorité particulièrement chaleureuse et intense de cet instrument s’est trouvé également être en résonnance avec le caractère de mon piano Fazioli, qui est particulièrement expressif dans le même registre sonore !

Le résultat final en a été une exécution « millimétrée » de 3 oeuvres majeures de Beethoven, les « 12 Variations sur un thème de « Judas Macabäus » de Haendel », et les « Sonates op. 102 N°s 1 et 2, soit les Sonates N° 4 et N° 5″ des cinq écrites par le même compositeur. Si la première oeuvre est une oeuvre de jeunesse, tout au contraire, les 2 dernières sonates pour violoncelle et piano sont des oeuvres tardives de Beethoven.

Les 12 variations sont empreintes d’une grande fraîcheur. On y retrouve les réminiscences de style d’un Mozart finissant, quelque chose de Haydn, et une écriture encore largement classique doublée d’une imagination foisonnante dans le traitement du thème original.

À l’envers, les deux sonates frappent par des atmosphères changeantes, tantôt très épurées et lyriques, tantôt sombres, voire plus touffues. Des oeuvres parcourue d’un grand souffle. Pour la sonate N° 5, une particularité singulière: le dernier mouvement n’est qu’une longue fugue, forme qui n’est plus très usitée à cette époque, sauf pour créer des effets passagers; forme souvent réduite à une exposition de fugue dont l’écriture perd rapidement son caractère polyphonique après les entrées successives du thème.

Cette fugue semble de prime abord répondre aux mêmes caractéristiques, sauf que l’exposition initiale va quand-même plus loin que bien des fugues de l’époque romantique. Mais le glissement vers une forme plus libre s’amorce, jusqu’au moment où apparaît une nouvelle exposition de fugue, cette fois-ci avec …un autre thème, sans que le premier ne disparaisse complètement. Ce mouvement est donc d’une grande densité et s’achève de manière inhabituelle, en ne donnant pas l’impression que c’est une « vraie » fin. D’aucuns penseront peut-être que ce mouvement a quelque chose d’incongru dans une sonate en trois mouvements, surtout comme mouvement final, mais il est improbable que Beethoven se soit « raté » là, ou qu’il ait suivi une impulsion fantaisiste un peu saugrenue et déconcertante… Déconcertante, peut-être, mais certainement voulue telle.

En tous les cas, entre les mains de nos musiciens, ces oeuvres ont sonné dans toute leur ampleur, et du fait de la chaleur du son des 2 instruments, les musiciens ont même pu se laisser aller à faire sonner leurs instruments sans trop de retenue, et ce sans pour autant « saturer » les oreilles d’un public qui entendait tout-de-même ces oeuvres dans un espace de volume réduit, celui de notre salon. Mais nous avons apprécié d’entendre toutes les subtilité de jeu, ainsi que la griserie d’être parfois « douchés » par l’ampleur sonore de passages qui donnent ainsi leur pleine mesure.

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Un mouvement d'une suite de Bach pour faire entendre l'instrument en solo

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Un violoncelle tout juste inauguré, d'un luthier bruxellois

En fin de concert, Niall Brown s’est fait un plaisir de nous présenter son nouvel instrument et quelques éléments de son histoire. Je sais d’expérience ce que représente le bonheur et …l’excitation de commander à un artisan un instrument de musique, de suivre un peu sa fabrication, et le moment magique où vous avez l’instrument achevé sous les doigts. Une expérience que tout consommateur achetant un produit fini dans un supermarché ne connaît  en général pas !!!

L’exécution de ces oeuvres de Beethoven faisait preuve d’une grande maturité de la part des artistes, et c’est compréhensible: ils les jouent tant et plus en concert, en vue d’un enregistrement prochain de toutes les oeuvres de Beethoven pour violoncelle et piano. Nous nous réjouissons d’avance d’avoir entre les mains les disques dès leur future parution…

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Au revoir et merci, Mesdames et Messieurs le public !

 

Encore une petite, pour rire !

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Tiens, un mini-violoncelle... un violoncelle piccolo ? Oui, ça existe, mais c'est quand-même trop petit... Simplement, le violon d'une personne du public, joué comme un violoncelle !