François Karth, violon; Olivier Lattion, piano: Brahms et Mozart

Compte-rendu du concert:

Ce dimanche dernier 9 Mars 2008, le violoniste François Karth nous gratifiait d’une seconde étape à La Goulue. Il nous avait fait découvrir une première fois son talent accompagné de mon frère François; cette fois-ci il a fait paire avec le pianiste Olivier Lattion, au service de 3 oeuvres d’envergure: une sonate de Mozart et les 2e et 3e sonates de Brahms.

Concentration: c'est que dans ce répertoire, une note à côté, bonjour la suite !

Des oeuvres relativement connues, surtout la 3e sonate de Brahms. Mais des oeuvres point si faciles à …défendre musicalement ! Sans parler des difficultés techniques, les 2 compositeurs posent des problèmes très différents pour l’exécution de leurs oeuvres.

En effet, Mozart a vu ses oeuvres pendant trop longtemps entachées d’un cliché de musique éthérée, celle du « divin petit Mozart », dont les oeuvres devraient être jouées avec légèreté, douceur, et sans « irrégularités », tant dans le toucher que dans les tempi… Il faudrait que ça coule comme l’eau d’un ruisseau, dans des rivières d’arpèges et de traits rapides…

Grosse erreur, de mon point de vue ! Il n’est que de lire la correspondance de Mozart pour découvrir un enfant, puis un adolescent vite grandi, mais de toute façon bouillonnant, aux facettes multiples, tout sauf sage, passionné et entier comme savent l’être les enfants et les jeunes adultes, mais également au fait de tous les usages de son temps, et ayant un horizon déjà très vaste passé la quinzaine. Or les interprètes, encore actuellement, semblent toujours garder une certaine peur de la musique de ce jeune prodige, l’abordant avec une grande prudence alors que tous les registres expressifs, de la tendresse à la passion, de la jubilation à la tristesse, cohabitent et s’enchaînent même parfois de manière plutôt abruptes…

Je dois avouer avoir perçu encore un peu de cela dans la sonate de Mozart telle qu’interprétée par nos deux artistes, même si cette dernière fut loin d’être mièvre. Mais le pianiste l’a abordé, de mon point de vue, avec encore un trop grand « respect », malgré le fait que cela nous ait permis d’apprécier son toucher d’une grande finesse et subtilité.

Olivier Lattion: pour Brahms, il faut un certain ...poids dans le toucher !

Brahms pose des problèmes diamétralement opposés: son écriture est bouillonnante et très dense. La partie de piano, très « athlétique » et chargée, incite à se laisser emporter, et le violon n’est pas en reste. Difficile dans ce contexte de donner une certaine clarté au discours musical, pour nous éviter d’en sortir « douchés » pour le compte et assommé d’élans passionnés et d’enchaînements de grans accords parallèles… Là, les artistes s’en sont très bien sorti, maintenant un souffle et une conduite de la musique très claire.
Il faut dire que mon piano Fazioli semble comme taillé sur mesure pour cette musique: de sonorité ronde, chaude et puissante, il répondait au quart de tour aux sollicitations du pianiste qui le jouait avec ravissement… Pour lui donner la réplique, le violoniste et son instrument flambant neuf (pensez donc seulement: il venait d’en prendre livraison 9 jours auparavant) ont fort bien su répondre, dans le contexte d’une musique dont on ne peut plus dire que le piano « accompagne » le violon… Dans notre « salon de musique », ce dernier sonnait à l’aise, avec de beaux aigus et une sonorité harmonieuse sur toute l’étendue de l’instrument, lequel a certainement encore un grand potentiel de développement sonore devant lui, mais a bien su répondre aux énergiques sollicitations de son propriétaire, tant que dans les passages musicaux de caractère plus intimiste.