Un 125e Concert d’enfer… pour aller au paradis !
Or donc, comme annoncé, nous accueillâmes nos amis Ruedi Lutz et Emmanuel Le Divellec ce 6 octobre dernier pour un nouveau mémorable concert d’improvisations… 65 personnes étaient de la partie, La Goulue donc bien remplie, l’ambiance était chaude chaude chaude…
Un sujet de plaisanterie s’est imposé tout-de-suite: Emmanuel avait oublié sa valise dans le train le menant depuis Hannover ! Que de démarches à entreprendre en arrivant, il a dû mentionner cet anecdote qui a influencé ses improvisations, cela pouvait s’entendre !…
Nous avions fixé comme thème (surprise) de la soirée: des mélodies populaires suisses, parmi lesquelles nous avions bien sûr proposé le ranz des vaches, notre hymne national et « Là-haut sur la montagne »… C’est curieux parfois de pouvoir vérifier l’effet constant que font sur les gens certaines de ces mélodies… Prenez juste le Ranz des vaches: nos artistes ont voulu « conduire » le chant par l’assemblée des auditeurs, mais impossible ! Avant qu’ils n’aient pris le ton, les gens avaient commencé à chanter tout seul, sans direction, nos amis en ont été soufflés ! Puis ce fut le tour du public de découvrir tout ce qu’on pouvait faire en improvisant sur des bouts des mélodies et des rythmes composant cette musique devenue mythique en Suisse romande.
Nous avions décoré La Goulue en conséquence, accueillant les auditeurs dans un salon parcouru de grands fils en étoile, sous lesquels pendaient drapeaux, images mythiques de la Suisse, le décor était planté ! Nos artistes nous ont promené sur divers chemins, ne se contenant pas des seules mélodies populaires, pour amener un peu de diversité.
Mais ce qui nous a frappé, ce fut une édition plus chargée d’émotions que la précédente par exemple. Le plaisir de la part de nos artistes à venir animer ce 125e concert a rencontré un plaisir du public à venir ré-écouter notre duo, pourtant pour la 4e fois ! La magie opère toujours, et l’interaction entre les gens et les artistes amène l’ultime déclic qui permet soudain à nos improvisateurs de se lancer dans des effets surprenants, notamment lorsque Emmanuel s’est glissé entre les gens pour accéder de manière improbable au clavier du piano, pour nous gratifier d’une improvisation dans le style impressionniste, très sensible, pleine d’atmosphère plus que de virtuosité. Un grand frémissement a parcouru toute l’assemblée. Ruedi n’a pas été en reste et a également fait un passage par le piano, ce qui nous a donné l’occasion d’entendre des prestations plus variées et contrastées que la fois précédente.

Les chemins vers le piano sont décidément bien étroits: heureusement qu’Emmanuel, pour grand qu’il soit, est mince…
L’ennui, c’est que c’est juste impossible de raconter un tel concert ! Il aurait indiscutablement fallu être là: c’est l’art de l’instant, quelque chose qu’on ne peut plus reproduire ni raconter. C’est déjà de manière générale la magie de la musique: on ne fait qu’une fois, deux interprétations ne sont jamais rigoureusement les mêmes, et il y a l’atmosphère inimitable du concert. Mais dans le monde de l’improvisation, c’est encore plus flagrant !
Il y eut également un moment particulier dans la soirée… Trrrrrrrès difficile pour moi d’en parler, mais le moment fut trop important, y compris musicalement, pour que j’omette de mentionner cet événement: Ruedi s’est soudain lancé dans un portrait dithyrambique de votre serviteur, de son entreprise de « concerts en gros », ou en grand… un interminable palmarès de mes qualités et réalisations… je trouve toujours gênant d’être au centre de ce genre de prestation… Je préférerais presque que cela se dise en mon absence…

Ruedi concentré: jouer en création une de ses propres compositions, difficile en plus, requiert beaucoup d’attention, ….pour moi aussi, le destinataire de l’oeuvre…
Mais le « pire », donc le meilleur, était à venir: Ruedi a annoncé avoir composé une grande fugue pour moi seul… Il s’est mis au clavecin pour la jouer, c’était vraiment une grande oeuvre, très difficile, et qui a duré plusieurs minutes. Après l’avoir joué, il m’a rejoint pour m’en donner le manuscrit autographe, qui m’était clairement destiné ! Un indicible moment d’émotion ! Qu’est-ce qu’un musicien peut offrir de plus beau et de plus significatif qu’une composition ? Et Ruedi Lutz, à part l’improvisation, a de multiples cordes à son arc, notamment une grande carrière d’organiste, la réalisation en cours d’une immense opération d’enregistrement de toutes les cantates de Bach, chaque fois données en concert d’abord, accompagnées d’une analyse musicale, musicologique et théologique de sa part, une cantate chaque dernier vendredi du mois… Chaque cantate ainsi exécutée, « décortiquée », puis rejouée, faisant l’objet d’un DVD… Une remarquable entreprise ! Mais en outre, Ruedi compose passablement d’oeuvres musicales en tout genre, oratorios, pièces pour clavier, plusieurs de ses oeuvres ont été enregistrées, ainsi que de nombreux concerts d’improvisation ! Et accessoirement, il joue du …hackbrett dans un ensemble de musique traditionnelle dans son canton de domicile, St-Gall…

Satisfaction réciproque: nous avons toutes et tous passé une magnifique soirée musicale ! Reste la partie conviviale et récréative…
La soirée s’est terminée autour de nombreuses victuailles… Comme d’habitude, chaque automne, je ramène d’un champ de courges des citrouilles gigantesques, dont l’usage est de préférence réservé à de grands événements comme ce concert, histoire de préparer une magistrale soupe à la courge ! Le spécimen en photo ci-joint pesait 60 kgs ! J’en ai fait 20 litres de soupe, ce qui ne représentait qu’un tiers de la courge, et il n’est rien resté de ces 20 litres… accompagnés par de nombreuses contributions culinaires, largement amenées par nos convives.
Un peu plus tard, on a encore servi la raclette pour les celles et ceux qui avaient encore le courage et le plaisir de rester un moment de plus…
Une mémorable soirée donc, avec, c’est toujours agréable et réjouissant, une excellente fréquentation, dont les auditeurs-spectateurs-convives n’ont pas manifesté de regrets d’être venus…
Parviendra-t-on encore à tenir jusqu’à un 150e Concert à La Goulue ? Le palmarès est déjà immense avec 125, et les problèmes déjà mentionnés de baisse de la fréquentation moyenne par concert nous causent de sérieux soucis pour la poursuite de l’entreprise, ne fut-ce que pour des raisons financières ! Votre venue et vos contributions aux collectes sont indispensables pour que nous puissions payer les artistes qui se produisent chez nous !
Venez donc nombreux écouter les prochains concerts !
Si vous souhaitez trouver des renseignements sur nos artistes, je laisse les liens sur leur site Internet: Ruedi Lutz et Emmanuel le Divellec!